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Billets d´humeur

"Investisseur touristique cherche couple de managers entrepreneurs sans aucune expérience dans le domaine, pour la construction d´un campement au milieu de la savane africaine, sa commercialisation et sa postérieure mise en opération".  Telle aurait pu être l´offre d´emploi à laquelle nous nous sommes présentés en mars 2013 alors que nous cherchions une autre vie en Afrique. Arrivés le 30 avril 2013 au Kenya, notre petite famille s´est installée dans le Mara après un court séjour préparatif à Nairobi où se trouvait l´ensemble de nos fournisseurs.  Cette section regroupe les textes écrits pendant notre séjour reflets de nos états d´âmes au cours de notre première année d´installation à l´autre bout du monde.

Premières sensations (Juin 2013)

 

Difficile de résumer 5 semaines en Afrique. Les mots ont beau être les mêmes: un village, une rue, un "centre commercial" mais la réalité est tellement différente. Le bordel et la vie qui grouille, les sourires le long des trottoirs défoncés, les accolades sur les ordures étalées. Des images fortes d´enfants faisant la manche, pieds nus sur l'autoroute, noirs au delà de leur peau auxquels ont arrache si facilement un sourire contre quelques galettes. Des vagabonds dormant sur les ordures, des marchés sur le sol, entre la pollution et les trottoirs défonces quand ils existent où une banane s'échange pour 10 centimes.

 

Retour en Europe (Jan. 2015)

 

Je n'arrive pas à dormir ce soir dans l'avion de retour vers l'Europe. Trop d'images dans la tête, trop de sensations à fleur de peau, un coeur encore à vif des adieux à cette terre et à ces gens, un corps encore tendu par les efforts accumulés. Deux ans d'Afrique...

J´ai touché des cadavres d'animaux, le ventre gonflé par les gaz jusqu'à ce que n'arrivent les hyènes pour leur ouvrir les entrailles et les vautours pour leur arracher les yeux. J'ai senti plus que de raison l'odeur de la mort - mélange d'herbe non digérée, de terre labourée, de sang et de sueur. J'ai d'abord tué puis appris à attraper les serpents vivants afin de les éloigner du campement.

Bilan au coin du lit (Jan. 2014)

 

Je me repose pour la première fois en 9 mois. Pas de bricolage aujourd'hui, pas d'équipe à gérer, de problèmes à régler, de négociations à reprendre. Pas de famille non plus, je suis seul, immobilisé en pleine nature par une voiture toujours pas réparée, un peu malade en mi journée - juste la fatigue physique accumulée lors de ces derniers mois à martyriser mon corps sept jours sur sept, profitant d'une sieste réparatrice et guettant l'ennui au coin de ma tente.

Quelques épisodes de walking dead meublent mon après-midi - les histoires de fin du monde me font paradoxalement sentir plus vivant. 

 

Hakuna matata (Sept. 2013)

 

Travailler en Afrique est tout sauf zen - précisément parce-que tout le monde l’est trop.  Les sourires, le calme et la patience dans les bons jours; la nonchalance, l'absence d'initiative et la faible productivité dans les mauvais génèrent les retards, les erreurs et les surcoûts sans que personne ne s'en inquiètent si ce n'est le muzungu (le Blanc) dont la patience se consume inexorablement et finit par exploser devant un public surpris par un comportement si éloigné de leur us et coutumes.

 

L'impatience est un luxe occidental: celui d'avoir trop à faire. Et la patience n'est pas une vertu dans le Mara mais la conséquence naturelle du désœuvrement.

Jusqu´ici tout va bien (Août 2013)

 

L'Afrique ou cette étrange sensation que tout peut empirer très rapidement mais que les choses finissent toujours par s'arranger en fin de compte comme par miracle.

Perdu dans le noir du Mara, une nuit sans lune, sans autre repère visuel que l´arbre suivant éclairé par les phares de mon tout terrain, je tourne en rond pendant presque deux heures.  Comment trouver une piste n'apparaissant sur aucune carte, aucun GPS, entre les multiples traces de pneu, sans indication, ni pancarte, sans lumière extérieure et pour seuls témoins les animaux omniprésents mais peu causeurs.  

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