L´odeur de la mort en 15 photos

“I smell a kill” fut la sentence de l´ascari Maasai qui transforma notre paisible marche nocturne en une petite aventure. "Comment le sais-tu?". "A quoi sent la mort?" Nos questions fusèrent tout à l´excitation d´une première fois idéalisée par nos fantasmes de citadins. En moins d´une minute la réponse s´imposa à nos sens; aux antipodes du stylisme des séries policières. Une odeur aigre, puissante et nauséabonde instantanément reconnaissable même pour les néophytes que nous étions. L´odeur de la mort. Un mélange de merde et d´herbe pas encore digérée dégoulinant de l´estomac crevé; une surenchère de sang, de chaire à vif, de sueur, de terre labourée et d´herbe fraichement coupée aux effluves d´autant plus intenses que nous arrivions très tôt après le crime. Autant de témoignages olfactifs ajoutés aux traces de combat sur le terrain qui témoignaient de la cruauté et de la sauvagerie du combat. Malgré l´absence du cadavre, emporté par son bourreau quelques minutes plus tôt, la mise en scène hypnotisait dans sa crudité interdisant tout lyrisme, remuant nos tripes et éclaboussant nos certitudes vitales.

Pilier de la vie sauvage au même titre que l´eau, les paturages et le soleil, la mort est omniprésente dans la savane. C´est ainsi que nous avons croisé de multiples cadavres tout au long de notre vie dans le Mara. En 15 photos, nous vous présentons ce cimetière à ciel ouvert, ce best-off de la mort "naturelle" dont l´homme, une fois n´est pas coutume, n´est pas responsable (à quelques exceptions près). Parce-que Dame Nature sait également nous émerveiller et nous terrifier en parts égales.

1) Patte de gazelle de Thomson trouvée au petit matin derrière notre maison probablement oubliée par une hyène trop pressée.

2) Impala trouvée mort à 100m du campement probablement victime d´un duel entre mâles.

3) Une famille de hyènes finissent une carcasse de buffle à l´entrée de la Réserve du Maasai Mara sur la piste menant au campement.

4) Une des nombreuses boucheries de Mara Rianda. L´animal (un mouton ou une chèvre) est tué le matin, suspendu dans l´échoppe et découpé au fur et à mesure des commandes. Pas de frigo ni de glace (Mara Rianda n´est pas connecté au réseau électrique) mais une viande très fraiche néanmoins car la bête est généralement vendue dans la journée.

5) Zèbre trouvé mort à 50m du campement ayant déjà subi les attaques des vautours commençant par les parties les plus molles et les plus faciles à manger (yeux, cou, intinstin, estomac, .. ). L´animal n´est pas encore assez décomposé pour eux. Mort malade, cet animal ne sera pas touché par les hyènes.

7) Topi mort aux pieds de William (et belle maman qui accourt dans le fond...)

8) Black mamba réfugiée dans nos égoûts et que j´ai du tuer (le serpent était trop rapide et trop grand pour que je puisse le capturer vivant sans risque).

9) Zèbre chassé et mangé à 50 mètres du restaurant de Kandili Camp où nous regardions un match de foot en petit comité (il n´y avait pas de client ce soir là). La photo est prise à la mi-temps de France Suisse pendant la dernière Coupe du Monde. Les lions étaient en train de manger à notre arrivée et nous avons du les éloigner pour prendre la photo. Ils sont à moins de 20 mètres au moment où cet instantané est pris, maintenus à distance par nos lampes torches attendant patiemment notre départ (ils revinrent terminer l´animal pendant la seconde mi-temps du match). Aucune animosité ne se lisait dans leur comportement malgré notre intrusion. Selon notre guide William, cette famille de lions vivant à moins de 2km du campement a intégré la présence humaine et considère Kandili Camp comme étant hors de son territoire.

10) Salamandre et petit serpent (okay, okay, ils sont vivants ceux-là...)

11 et 12) Scènes de la vie quotidienne dans le Mara

13) Hyène morte après avoir percuté la moto d´un Maasai (le chef de Kandili Camp pour ne pas le dénoncer...) sur la piste principale entre Narok et Mara Rianda. L´animal est mort depuis presqu´un jour au moment où je le trouve - personne n´a pris la peine de le retirer de la piste.

14) Restes d´un gnou tué par un léopard au campement - nous retrouverons les traces du combat (poils, sang et terre "labourée") tout autour de notre "jardin". Le léopard viendra trois soirs de suite pour finir la bête protégée des hyènes dans les hauteurs de cet acacia. L´arbre est à moins de 5 mètres de notre deuxième suite qui était occupée par des clients ce week-end là. Alors que cette tente est à moins de 50 mètres du restaurant, nous les emmenions se coucher en 4x4 (la Landrover affichait complet chaque soir car tous nos clients voulaient se joindre à ce mini-safari nocturne pour voir le léopard). Un escari restait stationné dans la voiture garée devant la tente toute la nuit.

15) Un des deux éléphants morts naturellement dans notre réserve à moins de 300 mètres du campement. Les défenses ont été découpées par KWS (Kenya Wildlife Service) comme le veut le protocole d´intervention. Mort naturelle qui a fait l´objet d´une courte enquête des rangers de KWS (histoire complète dans quelques semaines).